ALLOCUTION
DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC
PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
SUIVIE D'UN DEBAT AVEC LES ETUDIANTS DE L'UNIVERSITE TONGJI
SHANGHAI
LUNDI 11 OCTOBRE 2004
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Président de l'université,
Mesdames et Messieurs les doyens et professeurs,
Mesdemoiselles, Mesdames et Messieurs les étudiants,
Permettez-moi de remercier Monsieur M. Wen Gang, Président de l'Université de Tongji, pour son accueil chaleureux, et pour ses paroles de bienvenue. Merci aussi aux enseignants, aux étudiantes et aux étudiants, dont le talent fait la fierté de cette grande Université de Tongji qui contribue beaucoup à l'amitié entre la Chine et la France.
S'exprimer devant l'une des plus prestigieuses universités de Chine est pour moi un honneur. En effet, peu de pays ont élevé depuis si longtemps et à de tels sommets le savoir et le gout des lettres et des sciences.
Dès les premiers récits des grands voyageurs, la richesse et la puissance de la civilisation chinoise ont exercé, bien au-delà du continent asiatique, une fascination que le temps n'a jamais démentie.
L'imagination ne pouvait qu'être frappée par la singularité des artistes et des artisans de Chine dont les oeuvres alliaient les innovations les plus audacieuses aux esthétiques les plus raffinées. Il y avait là bien plus que le mystère qui entoure les univers longtemps méconnus. Il y avait surtout l'étonnement et l'admiration qu'imposent les créations qui révèlent le génie d'un peuple et marquent de leur empreinte décisive l'histoire de l'humanité.
Il faut à cet égard rendre hommage à toutes celles et à tous ceux, artistes et savants, qui se sont attachés, au fil des siècles, à mieux faire connaitre ce patrimoine exceptionnel, contribuant ainsi à la connaissance et à l'indispensable dialogue entre les peuples.
Faut-il voir, comme le voudraient les annales traditionnelles, dans ce puissant mouvement de l'histoire de la Chine, un grand cycle qui se répète avec un temps de morcellement territorial, suivi d'une phase brève et austère de redressement national, débouchant sur une troisième période de longues années de progrès et de bien-être ?
S'il en est ainsi, on peut escompter, au seuil du IIIème millénaire, un nouvel apogée. Seule la Chine, avec près de dix millénaires d'histoire attestée par l'archéologie, est en mesure de confirmer cette hypothèse.
C'est vous, étudiantes et étudiants de Chine, sur qui repose l'avenir de votre grande nation et aussi, par là même, une part importante de l'avenir du monde. C'est vous qui apporterez cette réponse. Et je ne doute pas un seul instant de la réponse.
Depuis deux jours, je retrouve en effet un pays en pleine mutation. Je vois une Chine confiante dans son avenir et qui est plus que jamais un partenaire majeur pour la France. Je redécouvre Shanghai avec un plaisir particulier. Comment ne pas sentir le foisonnement, l'énergie, l'irrépressible volonté d'aller plus loin, plus haut, de cette métropole d'exception, qui s'apprête à accueillir l'Exposition Universelle de 2010 ?
A travers vous, je souhaite m'adresser à toute la jeunesse qui est la force et l'avenir de la Chine. Une jeunesse créative, enthousiaste, avide d'apprendre, et qui souhaite mettre son dynamisme au service de son pays. Une jeunesse généreuse, éprise de justice, qui souhaite que son talent contribue à l'émergence d'un monde plus fraternel, plus prospère et plus pacifique, l'un n'allant pas sans l'autre. Une jeunesse qui, comme partout, bouscule les conformismes, s'interroge sur la meilleure facon d'atteindre ses objectifs et souhaite s'épanouir librement.
A la jeunesse de Chine, je veux dire l'amitié de la France, sa volonté d'aborder les défis de ce nouveau siècle aux cotés des Chinois dans un esprit de partenariat, de confiance et d'amitié. Sa volonté de soutenir les aspirations de la Chine à plus d'universalité et de fraternité. Fraternité, c'est à cela que nous exhorte la Déclaration universelle des droits de l'Homme, fondement, depuis la Révolution francaise, de l'éthique de notre temps. En découlent, dans le respect de leur diversité, les droits et les devoirs des hommes, des sociétés et des Etats.
Fraternité, c'est à cela que concourt le dialogue entre la Chine et la France. A Paris, en janvier, et à nouveau hier à Pékin, nous avons marqué avec le Président HU Jintao notre volonté d'aller plus loin encore dans notre relation, de mettre notre partenariat au service d'un monde de justice et de paix ; d'un monde de croissance et de bien-être ; d'un monde de responsabilité collective ; d'un monde de partage des savoirs et de respect des cultures et des identités.
Nos pays partagent une même conviction et une même volonté. Le monde est multipolaire. De nouvelles puissances et de nouveaux acteurs s'imposent, en particulier en Asie où des nations entières se sont arrachées à la pauvreté pour accéder à davantage de bien-être. Des ensembles régionaux se constituent, tels l'ASEAN ou l'union européenne. Nous allons vers un temps où l'influence politique, économique et culturelle est de plus en plus partagée, où les hommes revendiqueront plus de réciprocité, plus d'équilibre, plus de respect, plus de justice.
Face à cette évolution, la Chine et la France récusent la fatalité de l'affrontement ou du chaos qui résulterait du jeu sans controle des forces en mouvement. Elles sont engagées en faveur d'un multilatéralisme de l'action, reposant sur l'adhésion des peuples à la règle élaborée en commun, dans le respect de leur liberté et de leur identité. Nous voulons batir un ordre mondial de paix et de prospérité où, dans le cadre des Nations Unies, dont la France et la Chine sont membres fondateurs, les Etats acceptent librement de voir la force assujettie à la règle internationale.
Pour conforter l'adhésion des peuples à ce projet, il est temps que la composition du Conseil de sécurité reflète davantage la réalité du monde. Son élargissement à notre voisine et amie, l'Allemagne, mais aussi à d'autres grands partenaires du Nord et surtout du Sud s'impose. Comme s'impose également un role plus résolu de la communauté internationale dans la prévention des conflits et du maintien de la paix. C'est pourquoi la France soutient les efforts de la Chine pour un règlement pacifique de la question coréenne et encourage son implication accrue dans les opérations de l'ONU.
Nos pays contribuent aussi au nécessaire rééquilibrage du "grand triangle" de la croissance formé par l'Amérique, l'Europe et l'Asie, à travers leur implication dans ce dialogue si nécessaire entre l'Asie et l'union européenne, dialogue qui s'est poursuivi avec succès, notamment sur l'impulsion de nos deux pays il y a quelques jours, à Hanoi.
Nous vivons à l'heure des défis globaux: sauvegarder notre planète et promouvoir le développement durable; maitriser les grandes pandémies; nous protéger contre les fléaux du terrorisme, de la drogue ou du crime organisé. Autant de défis qui donneraient le vertige si nous n'avions la conviction qu'une action collective résolue est possible et efficace.
Les enjeux écologiques renvoient à une question simple mais pressante: quel monde laisserons-nous, laisserez-vous, à nos enfants, à vos enfants? La nature s'épuise: les prélèvements de l'homme dépassent la capacité de régénération de la planète. Face au réchauffement climatique, aux risques de pénurie d'eau potable, à l'appauvrissement de la biodiversité et des sols, à l'accroissement exponentiel des pollutions et des déchets, il y a oui, il y a péril en la demeure.
Et pourtant, la croissance économique doit se poursuivre, et même s'intensifier. Bien des peuples encore l'espèrent pour vaincre la pauvreté. Voilà pourquoi la France propose la création d'une organisation des Nations Unies pour l'Environnement, indispensable enceinte d'une gouvernance mondiale, équilibrée, équitable et efficace. Voilà pourquoi, nous devons inventer un nouveau modèle de développement, plus économe en ressources naturelles.
Nous avons évoqué toutes ces questions avec le Président HU Jintao. Notre capacité à mettre au point des procédés respectueux de l'environnement est l'une des clés de l'économie moderne. Le partenariat franco-chinois dans ce secteur est des plus prometteurs. Il procède de l'attitude pionnière et engagée que nous voulons, ensemble, adopter pour transformer les menaces en vecteur de progrès.
Face à ces défis, ne soyons pas défensifs ou résignés. Au contraire, projetons-nous vers l'avenir avec confiance. Notre but, c'est la prospérité et le bien-être pour tous. Il passe par la combinaison de l'économie de marché, elle-même créatrice de richesses, et de mécanismes de solidarité permettant d'assurer une distribution équitable et de lutter contre l'exclusion.
Dans cet esprit, j'ai proposé la création d'une instance politique internationale chargée de donner l'impulsion et d'assurer la coordination de nos politiques de maitrise et d'humanisation de la mondialisation. Elle a connu une sorte de préfiguration dans le dialogue élargi organisé par la France à Evian en juin 2003, et auquel participait naturellement le Président HU Jintao, au nom de la Chine. Elle s'inscrit dans le cadre de la préparation du Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement qui se tiendra à New York en septembre 2005 pour tirer un premier bilan de la réalisation des objectifs du Millénaire.
Alors que la marginalisation des pays et des régions les moins avancés s'accroit, notamment en Afrique, nous devons relever le défi du développement, et pour cela nous avons mobilisé toutes les énergies, poursuivre l'ouverture maitrisée des échanges commerciaux, multiplier les partenariats publics et privés, intensifier les transferts de technologies. Il nous faut aussi mettre en place les infrastructures de base et des systèmes éducatifs et sociaux performants qui sont les conditions premières du décollage économique. Cet acquis minimal, les pays et les régions les plus pauvres ne peuvent l'assumer seuls et ils ont un besoin impérieux de financements. Face aux insuffisances évidentes de l'aide publique, des solutions novatrices existent, et nous devons les encourager.
Réussir la mondialisation, c'est aussi respecter les cultures et les identités, sans lesquelles les sociétés ne peuvent pas s'épanouir dans la modernité. Parce que la culture n'est pas une marchandise ou un bien comme un autre, nos deux pays, la Chine et le France, appuient l'élaboration, sous l'égide de l'UNESCO, d'une convention internationale sur ce thème. Fidèle à sa grande tradition d'ouverture et de dialogue, votre ville à Shanghai accueillera, dans quelques jours, les ministres de la culture des pays qui soutiennent cette initiative.
La diversité culturelle signifie la prise en compte des spécificités de chacun et la reconnaissance de l'égale dignité des cultures. Elle est le corollaire de l'universalité des droits de l'homme et de cette volonté partagée de voir les progrès économiques et sociaux s'accompagner de progrès équivalents dans le domaine de l'Etat de droit et de la démocratie. Nous avons été heureux que le Président HU Jintao choisisse l'Assemblée nationale francaise pour affirmer sa volonté de continuer à faire avancer la Chine sur le chemin des droits civils et politiques, ainsi que des libertés fondamentales.
Nos deux pays entretiennent dans ce domaine un dialogue constant. Des coopérations sont engagées entre nos praticiens du droit: magistrats, avocats et notaires notamment. Elles sont porteuses d'avenir.
Ce dialogue des cultures doit aussi favoriser un égal accès à la connaissance. C'est en unissant les efforts à l'échelle planétaire que nous pourrons relever les défis scientifiques et technologiques du XXIe siècle.
Cette question vous touche de près. Vous êtes nombreux à Shanghai et en Chine à vouloir vivre l'expérience irremplacable d'études à l'étranger. Aujourd'hui, 7 à 8 000 visas d'études sont délivrés chaque année par la France. C'est trop peu. La France souhaite vous accueillir plus nombreux dans ses grandes écoles, dans ses universités. Une politique de bourses ambitieuse aidera les plus méritants et les plus motivés à mettre en œuvre leurs projets. A cet égard, je tiens à remercier, les entreprises chinoises et francaises du Comité d'honneur et d'organisation de l'Année de la France en Chine, qui m'ont fait part de leur volonté d'appuyer par leurs moyens et leur générosité l'augmentation du nombre de bourses qui pourront être attribuées à des étudiants chinois vers la France.
La barrière de la langue ne doit pas vous effrayer. Si les élèves des filières des quelques vingt lycées francophones de Chine, dont quinze ici à Shanghai, disposent d'un avantage évident, d'autres voies existent pour acquérir la base linguistique nécessaire à des études en France. Au sein des universités, ou dans notre réseau d'Alliances francaises de Shanghai, Pékin, Wuhan, Chengdu, Nankin, Xi'an, Canton et bientôt Dalian, l'offre d'apprentissage du francais est en constante augmentation.
Des diplomes reconnus en France parmi les plus prestigieux peuvent se préparer ici même à Tongji. Dans cet esprit, j'aurai plaisir à voir tout à l'heure et je viens de voir avec beaucoup de plaisir la maquette du Centre Franco-Chinois pour la Science, la Technologie et l'Innovation, créé en collaboration avec votre université par le consortium des écoles d'ingénieurs de Paris, ParisTech. Ce projet est exemplaire de l'esprit de coopération qui nous anime. Je souhaite en remercier les promoteurs, et en premier lieu le Président de Tongji. J'en félicite également l'architecte, M. Zhang Bin, lauréat du programme de bourses pour 150 architectes chinois lancé lors de ma visite que j'avais eu la joie de faire ici en 1997.
Le Centre franco-chinois pour la Science de Tongji, comme l'Institut Pasteur de Shanghai ou le Pole franco-chinois des sciences du vivant de Shanghai, illustrent les performances de notre coopération. Elle est aujourd'hui au meilleur niveau international dans bien des domaines, comme la recherche sur le génome humain, les matériaux supraconducteurs, l'informatique et les mathématiques appliquées.
Je souligne l'importance de cette coopération technologique, et je souhaite que les Chinois qui aiment et connaissent la France, sa culture, son histoire et son art de vivre, mesurent également mieux son poids scientifique, technologique et industriel dans le monde d'aujourd'hui.
L'une des toutes premières puissance économique du monde, la France est, avec plus de 400 centres de recherche d'entreprises internationales, un pays à la pointe du savoir et de l'innovation. Elle est ainsi à l'origine des grandes aventures technologiques européennes. Sans elle, l'Agence spatiale européenne ou la fusée Ariane n'auraient pu voir le jour. Airbus ne serait pas devenu le plus grand et le plus fiable des constructeurs aéronautiques du monde. Le Train à Grande Vitesse ne rayonnerait pas dans toute l'Europe, en Corée, et bientot je l'espère, en Chine.
Ce dynamisme ne se dément pas, avec par exemple -en partenariat avec la Chine- le programme Galiléo de positionnement géographique satellitaire ou le programme ITER de production d'énergie par la fusion des atomes.
Par sa puissance de création, par sa capacité d'invention, par sa fiabilité industrielle, la France est un partenaire naturel pour la Chine. Ses entreprises sont parmi les rares du monde à dominer l'ensemble des compétences et des savoirs nécessaires dans tous les secteurs clés des hautes technologies qui sont précisément la priorité de la Chine et de son développement. Pour renforcer leurs synergies, ces entreprises se fédéreront bientot dans un Comité francais des hautes technologies. C'est dire le champ immense de coopération que nos deux pays peuvent parcourir ensemble. C'est dire les perspectives qu'ouvrent à chacune et chacun d'entre vous la France, ses Universités, ses grandes écoles et ses entreprises.
Chers amis,
Vous êtes investis d'une responsabilité singulière: accomplir chacun votre destin, trouver les voies de votre épanouissement personnel, mais aussi répondre aux espoirs que votre grande nation place en vous pour construire la Chine de demain. Cette Chine qui regroupe le cinquième des habitants de notre planète, et dont il vous appartiendra de mettre le poids immense au service d'un monde plus fraternel, plus solidaire, un monde équilibré et en paix.
La France se tient à vos cotés. Que nos deux pays trouvent les voies d'un partenariat toujours plus étroit, tel est mon vœu le plus cher. Je compte sur chacune et chacun d'entre vous pour porter cet esprit de respect et d'amitié entre la Chine et la France. Mes voeux les plus chaleureux de réussite personnelle vous accompagnent.
Je vous remercie toutes et tous pour votre accueil. Dans les Entretiens de Confucius, il est dit : " une conversation avec vous vaut plus que dix ans d'études ". Alors, passons à la conversation.
QUESTION - Monsieur le Président, de 1997 à cette année, vous êtes déjà venu trois fois en Chine et j'aimerais savoir ce qui caractérise cette visite par rapport aux deux précédentes. D'autre part, nous célébrons cette année le quarantième anniversaire de l'établissement de relations diplomatiques entre nos deux pays. Quelle est votre évaluation de la relation bilatérale ?
LE PRESIDENT - Je voudrais d'abord vous dire que je suis venu beaucoup plus de trois fois en Chine et toujours avec le même intérêt et la même joie. Je suis venu trois fois en qualité de Chef d'Etat, vous avez raison de le souligner. Quelles sont les différences ou les évolutions ?
J'en vois essentiellement deux. La première est de nature économique et sociologique, le fantastique développement de l'économie et de la société chinoise. C'est évidemment d'une année sur l'autre ce qui impressionne le plus, quand on vient en Chine, les changements si rapides, tout en maintenant les principes sur lesquels la société et la culture chinoise reposent depuis si longtemps. La deuxième évolution, c'est incontestablement une meilleure compréhension et connaissance l'un de l'autre, de la Chine et de la France, et une volonté qui s'affirme de renforcer nos coopérations, nos partenariats. C'est très très net. Il faut dans la culture chinoise prendre le temps nécessaire pour permettre les évolutions qui s'imposent. J'ai vu, au fil des ans, se conforter et se prolonger une racine solide donnant un fruit qui est une coopération de plus en plus forte. Et je dirais de plus en plus amicale, et même chaleureuse. Ce sont les deux observations que je peux faire et je souhaite que sur cette lancée, de plus en plus, nos deux pays qui se connaissent de mieux en mieux, qui s'apprécient de plus en plus, dont les économies s'interpénètrent dont les partenariats se développent, travaillent ensemble la main dans la main pour les objectifs que j'évoquais tout à l'heure.
Alors, la France, c'est vrai, a été la première nation occidentale à reconnaitre la Chine, sous l'impulsion du Général de GAULLE qui avait une grande idée de la Chine, et de la place de la Chine dans le monde. Ce pays, disait-il, est plus vieux que l'histoire et il avait eu l'initiative le premier de nouer des relations diplomatiques entre la Chine et la France. Et cela a sans aucun doute marqué notre temps et surtout fait comprendre aux Francais, peut-être avant d'autres, toute l'importance de la Chine, le respect qu'on lui devait, et l'amitié réciproque qui devait être créé à partir de ces bases.
QUESTION - Le Centre Franco-Chinois sera bientot en fonction comme vitrine de l'échange et de la coopération entre la Chine et la France. Pourriez-vous donner une suggestion pour ce centre franco-chinois ?
LE PRESIDENT - Naturellement, je souhaite le développement actif des centres franco-chinois et le meilleur développement, c'est qu'il apporte à ces étudiants suffisamment de satisfaction personnelle et professionnelle pour que d'autres aient envie, plus nombreux, de venir. Et cela me permet d'évoquer un instant le problème de nos échanges d'étudiants et en tous les cas de notre ouverture aux étudiants chinois.
Depuis les années 1998, il y a eu environ 35 000 étudiants chinois qui sont venus faire des études et qui ont été diplomés en France. C'est insuffisant, et je souhaite beaucoup que nos universités, nos grandes écoles s'ouvrent davantage à de jeunes étudiants chinois ou chinoises. Alors comment faire pour faciliter ce mouvement? Je crois d'abord qu'il faut mieux informer, mieux orienter les jeunes étudiants chinois qui s'intéressent à faire des études en France.
Il faut qu'ils puissent trouver, dans des endroits faciles d'accès, des informations sur les études qu'ils peuvent faire en France, sur les moyens qu'il faut mettre en œuvre pour y accéder, sur les débouchés auxquels ils pourront ensuite prétendre. Je me réjouis de la création prochaine d'une structure qui va faciliter cette information et cette orientation de jeunes étudiants chinois, qui s'appelle le Club Chine et qui va être bientôt mis en œuvre.
La deuxième exigence, c'est de renforcer nos liens entre les universités francaises et chinoises. Quand je dis les universités, c'est au sens très large du terme qui inclut les grandes écoles.
Le mouvement est bien parti. Nous avons actuellement plus de 250 accords inter-universitaires entre la Chine et la France, et je crois qu'il faut poursuivre dans cette voie et qu'il est important que les universités chinoises et francaises puissent développer ces accords, puisqu'à travers ces accords, il y a la recherche, mais il y a aussi l'enseignement et la possibilité pour les jeunes francais de venir ici et pour des jeunes chinois d'aller en France.
Il y a un troisième élément qui est plus matériel et qui est le logement. Alors, d'une certaine facon, pour le logement, par rapport à d'autres pays, les étudiants étrangers qui viennent en France sont privilégiés dans la mesure où l'Etat prend une partie importante du cout du logement, mais en revanche, il n'y en a pas assez. Nous avons donc un problème d'insuffisance de logement et nous avons engagé une action pour augmenter le nombre des logements nécessaires aux étudiants francais et étrangers qui en ont besoin pour venir faire des études en France.
Et le dernier point, ce sont les bourses pour venir. Pour aller à l'étranger il faut avoir les moyens et ces moyens il faut qu'on vous les apporte, c'est ce qu'on appelle les bourses. Nous avons tous les ans un certain nombre de bourses francaises destinées aux étudiants chinois. Elles sont à l'évidence insuffisantes, je veux dire pas assez nombreuses, c'est évident. Donc, nous avons engagé une action pour augmenter sensiblement le nombre des bourses qui seront attribuées à des étudiants chinois qui veulent faire des études dans les grandes écoles ou dans les universités francaises.
Je voudrais à cet égard exprimer toute ma reconnaissance au Comité d'Honneur. Le Comité d'Honneur franco-chinois, ce sont l'ensemble des grandes entreprises, francaises et chinoises qui se sont rassemblées pour trouver les moyens nécessaires à la promotion de l'Année de la France en Chine, comme il y avait eu l'Année de la Chine en France, qui a été vous le savez, un très grand succès. Ce Comité d'Honneur a décidé de poursuivre son œuvre après l'année de la France en Chine pour recueillir les fonds nécessaires à la création d'un certain nombre de bourses qui s'ajouteront à l'augmentation de bourses prévues par l'Etat.
Voilà, si vous voulez, quelques idées que je souhaite développer pour intensifier, augmenter le mouvement d'échanges entre les étudiants chinois et les étudiants francais.
INTERVENANT - Monsieur le Président, je viens de l'institut de développement urbain, et nous sommes très heureux de vous voir. A cette occasion, mes collègues et moi avons décidé de vous offrir un petit cadeau, qui j'espère va vous plaire. Il s'agit d'une forme d'art traditionnel chinois qui est imprimée sur bloc de bois, une aquarelle et le titre de l'œuvre est "abondance". Il s'agit de deux grappes de raisin qui représentent la France et sa culture vinicole et le vase est orné d'un dragon. Les nuages représentent la Chine, les sarments de vigne représentent un souhait, à savoir que les échanges franco-chinois continuent d'apporter des fruits d'abondance.
Mais je pense qu'il faut encore compléter cette œuvre, car il faut encore un sceau qui nous dise que vous espérez pouvoir renforcer l'amitié franco-chinoise. Alors je pense qu'on va vous donner l'instrument pour le faire. Etes-vous d'accord, Monsieur le Président ?
LE PRESIDENT - Juste un mot pour exprimer ma reconnaissance aux deux étudiants qui m'ont offert ces cadeaux auxquels j'ai été infiniment sensible. Si j'ai bien compris, la peinture et l'évocation qu'elle représente, notamment le vin francais, n'a rien à envier au traditionnel vin de riz de Chine qui a inspiré tant et tant de poètes, depuis si longtemps, il est probable que le vin de Chine a inspiré beaucoup plus de poètes, et parmi les plus grands, que le vin francais. Ce qui n'est naturellement pas désobligeant pour notre vin.
Je voudrais remercier cette étudiante parce que je trouve que c'est une très belle gravure et elle me dit que c'est un collègue qui a réalisé la calligraphie qui est très jolie. Je lui demande de transmettre à son collègue toutes mes félicitations, je vois là la naissance d'une de ces calligraphies maigres et fermes comme disait DU FU et qui atteint avec l'age et l'expérience le divin. En tous les cas, ceci m'a fait un immense plaisir et je vous en remercie.
Je remercie chacune et chacun d'entre vous. Je vous souhaite bonne chance, bon vent, beaucoup de bonheur personnel et dans votre vie professionnelle.
法国总统希拉克上海之行的第一站选择了知名学府同济大学,并为中国的学子们发表了精彩的演讲。希拉克在半个多小时的演讲中,旁征博引,比喻形象,评价中肯,博得了台下阵阵掌声。
部长先生、校长先生、各位系主任、各位教授、上海及全中国的同学们:
请容许我向同济大学校长万钢教授致谢,谢谢他的热情接待和友好欢迎词。也谢谢在场的教授们和男女同学们,同济大学以你们的才华为荣,而我们都知道卓越的同济大学对于中法两国友谊的维系,做出了多么重大的贡献。
关于文化遗产
中国艺术和手工艺使我们的想象力不得不受到震撼。
从早期的大旅行家遗留的文献中,可以发现中国富庶和强盛的威盛名,早已远播到亚洲之外的地区,外人对中国的向往经过了漫长的岁月,依然一点也没有褪色。
中国艺术和手工艺的独特风貌,使我们的想象力不得不受到震撼,这些作品将最大胆的创新和最高雅的美学品位完美结合。我们不仅为长久隔阂世界的神秘氛围所感动,这些作品还使我们不得不震惊、景仰,因为它们揭示了一个民族的才华,而且在人类历史上留下了不可磨灭的烙印。
因此,我们必须向历代的艺术家和学者们致意,他们努力把中国非凡的文化遗产发扬光大,促进了知识的传播和各民族之间的对话。
我们是否应该采用传统史书的观点,把目前中国历史的蓬勃发展,视为历史周期的一个新阶段?起初是一个分裂的局面,然后是一段艰苦而短暂的国家振兴阶段,到了第三个时期,才进入长治久安的太平盛世。
如果这种观点是正确的,在这第三个千年起步的时刻,我们可以期待一个新的高峰。要证明这个推论,只有经过考古确认其历史长达近万年的中国才能做到。
只有你们,中国的学子,可以给这个问题带来答案。因为你们的泱泱大国把未来寄托在你们身上,全世界的未来有一部分也将由你们决定。我对这个答案从来没有怀疑过。
关于中国青年
不为迂腐的陈规所束缚,使自己自由全面发展
两天来,我在这里看到一个变动中的国家。我看到对未来信心百倍的中国,这正是法国需要的主要合作伙伴。我重访上海特别高兴。在这个举世无双、忙于筹办2010世博会的大都会,怎能不感受到它的丰富、活力,和走得更远、更高的坚毅决心?
通过你们,我想对全中国的青年们讲话,因为你们是中国的力量和未来。中国青年创造力强、热情洋溢、求知欲旺盛,而且乐意为国家效力。中国青年慷慨、热爱正义,愿意贡献他们的才华,为建立一个更博爱、更繁荣、更和平的世界而奋斗。中国青年也和世界各地的青年一样,不为迂腐的陈规所束缚,精心设计实现个人目标的最好办法,希望使自己自由全面发展。
我要向全中国的青年传达法国的友谊,告诉他们我们要和中国人并肩作战,一起迎接新世纪的挑战,以互助、互信、友爱的精神共同合作。我们愿意支持中国达到更完美的普遍性和博爱精神。博爱是世界人权宣言对我们的基本要求,也是法国大革命以来,我们这个时代伦理观念的基础。由博爱精神推衍出来的,就是人类、社会和国家的权利与义务,这应以尊重其多样性为前提。
博爱精神,也是法中两国对话的主要目标。今年1月在巴黎,还有昨天在北京,胡锦涛主席和我两度强调我们进一步加强法中关系的决心,我们的合作关系将为未来的世界服务,我们渴望的世界将是正义、和平的,稳定增长,生活小康;责任由群体分担,知识由众人分享;各民族不同的文化与特性都受到应有的尊重。
关于安理会改革
调整联合国安理会的组织,使其更好地反映世界的现状
我们两国拥有相同的信念和相同的心愿。世界是多极化的。新的强国和新的成员不断崛起,尤其是在亚洲,很多国家都脱离了贫困的劣境,人民的生活得到了改善。区域性组织如东南亚国家联盟或欧洲联盟也纷纷崛起。我们未来的时代,将是政治、经济、文化影响力均衡的时代,人人都会要求更多的互惠、均等与尊重。
面对时代的演变,中国和法国坚决摒弃冲突或混沌的宿命论,因为那是放纵各种势力盲目发展的结果。我们两国积极支持多边行动,这是以各民族一致接受共同制定的规则为基础,这些规则必须尊重各民族的自由与特性。中法两国都是联合国的创始成员,我们希望在联合国的框架下,建立一个和平繁荣的国际秩序,各成员国自愿使武力臣服于国际规则的控管之下。
为了争取各民族对这个计划的支持,现在应该及时调整联合国安理会的组织,使其更好地反映世界的现状。安理会的成员应该包括法国相邻的友邦德国,以及包括南北半球的大国,尤其是南半球的大国。国际社会在防止冲突、维持和平的层面上,也应该扮演更具决定性的角色。因此法国支持中国用和平手段解决朝鲜问题的政策,也鼓励中国更深入地参与联合国的行动。
我们两国也通过在欧亚对话中的投入,努力在美、欧、亚经济增长“大三角”之间,争取必要的新平衡局势。不可或缺的欧亚对话,几天前又在越南河内成功地持续进行。我们现在面临着各种全球性的挑战。如拯救地球、推动可持续发展、控制大规模流行病,以及对抗恐怖主义、吸毒、犯罪集团等祸害。这么多挑战够令人眼花缭乱,幸而我们相信,集体、坚决的行动将是可能的而且会是有效的。
关于环境保护
法国提议成立联合国环保组织
环保的关键可以用一个简单却急迫的问题来表明:我们将留给孩子们怎样的世界?自然资源不断耗损;人类开采的各种资源远远超出了地球再生的能力。面对全球气候升温、饮用水缺乏的威胁、物种减少、土壤贫瘠化、呈指数曲线增加的污染和垃圾,问题已经迫在眉睫了。
然而,经济必须持续增长,甚至快速增长。还有很多民族需要靠它与贫穷作斗争。这就是为什么法国提议成立一个联合国环保组织,因为国际间应有一个公平、高效的全球主管机构。这也就是为什么,我们必须创建一个新的、节约自然资源的发展模式。这个领域的中法合作项目前景最为看好。我们要采取一种拓荒者的投入态度,把威胁转化为进步的动力。
关于奋斗目标
让人人的生活达到小康境界
面对这些挑战,我们不要只求自保,也不要听天由命。相反地,我们应该满怀信心地前瞻未来。我们的目标是让人人的生活达到小康的境界。要达到这个目标,必须结合市场经济和互助的社会机制,因为市场经济可以创造财富,而互助机制可以保证财富的公平分配,缓和贫富不均的问题。
为此,我主张成立一个国际性的决策机制,对全球化加以控制并使其人道化,该机制将负责各国政策的协调与推行。这个机制的雏形,可以说是形成于法国于2003年6月在埃维昂举办的八国扩大峰会,中国也曾受邀参加。这个构想也列入2005年9月将于纽约召开的各国首脑峰会筹备工作之中。
目前落后国家及地区,尤其是非洲,边缘化的现象越演越烈,在这个时刻,我们更应该迎接发展的挑战。为此必须动员所有的力量,继续进行有序的开放贸易,促进公私合作,加强技术转让。我们也必须建设基础设施和高效的教育与社会体系,因为它们是经济腾飞的首要条件。然而最贫穷的国家及地区连这些最起码的设施都无法独立完成,因此他们迫切需要外资的援助。面对政府援助的不足,对一些创新的解决之道,我们应该尽量给予鼓励。
关于文化多样性
接受每个民族特点赋予文化平等的尊严
全球化要成功,必须使各民族的文化和特性受到尊重,否则各社会将无法在现代化中充分发展。因为文化不是一般的商品或财产,所以我们两国主张在联合国教科文组织领导下,就文化议题制定一项国际公约。一向以开放与对话为传统的上海市,将于几天后接待支持这项文化公约的各国文化部长,在这里召开会议。
文化多样性的意义,就是接受每个民族的特点,赋予每个文化平等的尊严。文化多样性是人权普遍性的自然延伸,它来自一个共同的意愿,即在经济、社会进步的同时,在法治、民主方面也应享有同样的进步。文化对话也要使人人享有获取知识的平等权利。唯有结合全球的力量,我们才能面对21世纪的挑战。
关于出国留学
希望更多人能来法国大学就读
新科技和你们息息相关。在上海、中国有很多像你们这样的大学生,想要亲身体验出国留学的宝贵经验。目前,法国每年发给中国学生7000至8000个留学签证。这太少了。希望你们更多的人能来法国的大学和名校就读。我们突破性的奖学金政策,将帮助最优秀、最认真的学生落实他们的学习计划。
你们不要畏惧语言障碍。在中国大约有20所法国高中,其中15所在上海,虽然这些高中的学生占有一定的优势,但也可以通过其他途径,取得在法国学习所需的基本法语知识。
关于科技合作
希望TGV驰骋于中国大地
中法合作项目在很多领域,都已达到国际最高水准。这些领域包括人类基因组研究、超导材料、信息技术和应用数学。我希望了解法国和它的文化、历史、生活艺术的中国人,能够更准确地衡量法国在当今世界所占的科学、技术与产业地位。
法国在世界经济强国之中名列前茅,拥有400多个国际企业附设研究中心,在知识与创新方面,走在时代前列。如果没有法国,可能就不会有欧洲空间局和阿丽亚娜火箭。空中客车公司可能也不会成为世界最大的民用客机制造商。TGV超高速火车可能也不会穿梭于整个欧洲,我希望不久后它也能驰骋于中国大地。
法国的科技活力一如既往,这一点从我们和中国合作的迦俐略卫星定位系统,或国际热核聚变反应堆ITER,都可以得到验证。
因为法国拥有强大的创造力、发明力和可靠的产业基础,所以是中国理所当然的合作伙伴。法国拥有世界上首屈一指的、掌握高新科技重点项目技能与知识的企业,而高新科技正是中国优先的发展领域。由此可见,我们两国可以合作的领域多么辽阔。
亲爱的朋友们,你们肩负一项特殊的使命:你们每个人要去完成自己的事业,寻求个人充分发展的途径,但同时也要回报国家对你们寄予的希望,共同建设明天的中国。拥有全球五分之一人口的中国,要靠你们善用这个庞大的力量,去建设一个更博爱、更团结的世界,一个更均衡的和平世界。
法国站在你们这一边。愿我们两国的合作越来越紧密,这就是我最大的心愿。我把希望寄托在每一个同学身上,中法两国互相尊重和友爱的精神,要靠你们传递。我以最热切的期盼祝你们成功。你们的事业马到成功。
感谢各位同学。中国有句古话说:“闻君一席话,胜读十年书。”现在就让我们开始对话吧。
(演讲全文略有删节)